Les systèmes d’apprentissage adaptatifs basés sur l’apprentissage qui se produit avec des ressources en ligne impliquant des réseaux sociaux virtuels dans le monde où «, les réseaux sociaux virtuels – largement démocratisés de nos jours – sont des espaces d’apprentissage quotidiens. L ‘ »autodidaxie » individuelle ou collective (auto-apprentissage) est répandue dans ces nouveaux univers suggérant la rareté voire la non-existence des relations d’apprentissage social. »(Cyrot & Jeunesse, 2012).

Cependant, le site belge formaform.be révèle certains avantages sociétaux. En effet, il affirme que grâce au système ESCO, « un système européen de classification multilingue des compétences, compétences, certifications et professions » utilisé par la plateforme d’apprentissage adaptatif, les utilisateurs « de différents pays européens peuvent échanger des ressources liées aux compétences / aptitudes sans aucune ambiguïté. « Le site déclare également que la plateforme peut être utilisée comme un réseau d’apprentissage informel. ( » Nous avons testé pour vous ! MyLK, un outil pour gérer et partager votre apprentissage numérique « , 2018). Ces deux affirmations suggèrent que l’apprentissage adaptatif numérique favorise le « social learning” et intègre une grande partie de la population. La critique souvent faite à la technologie d’apprentissage numérique pour isoler les apprenants dans leur apprentissage serait alors hors de propos dans de nombreux cas même si les systèmes sont basés sur l’individualisation des parcours d’apprentissage / de formation à travers le suivi des données d’apprentissage et de leur traitement par une IA.

En fait, sur les plateformes d’apprentissage numériques, le principe de l’apprentissage social est très présent car les utilisateurs peuvent «s’influencer» les uns les autres sur le contenu qu’ils consultent et les chemins qu’ils empruntent parce que «le monde extérieur est… le facteur qui a le plus d’influence sur le comportement. »(Fenouillet, 2017, p. 30). Cette position fait écho à l’affirmation de Philippe Carré: «On apprend toujours seul… mais jamais sans les autres» 1. Ainsi, «Si nous savions déjà que l’auto-apprentissage, hier ou aujourd’hui, n’est pas une forme de solo-formation, si nous savions aussi que tout acte d’apprentissage, y compris d’auto-apprentissage, est un acte social, l’exploration présentée ici révèle également la dimension sociale de l’apprentissage médiatisé par l’ordinateur dans le cadre de l’utilisation d’Internet et des réseaux sociaux virtuels contemporains. Ainsi, la sociabilité (avec les autres) coexiste naturellement avec l’auto-apprentissage (par soi-même) même en face à face avec la machine. « (Cyrot & Jeunesse, 2012)

Le cas du projet MYLK :

Pour illustrer l’impact de l’utilisation du suivi, de l’IA et de l’apprentissage adaptatif dans l’éducation des adultes et l’apprentissage social, nous pouvons analyser les commentaires du groupe de test sur la plateforme MyLK. Les tests ont eu lieu en France, en Pologne et aux Pays-Bas. Les utilisateurs étaient composés de 58% de travailleurs, 37% d’étudiants et 5% de représentants d’entreprises. Tous les participants étaient des adultes.

Il est intéressant de comprendre les retours des utilisateurs car le suivi des données d’apprentissage pour proposer un contenu personnalisé (apprentissage adaptatif) grâce à l’analyse des données (IA) sont des objectifs centraux de la plateforme.

Les commentaires des utilisateurs ont montré que 54% des utilisateurs disent que MyLK favorise l’apprentissage grâce au suivi des données. 89% de ces répondants pensent que MyLK leur permet en fait de gérer le contenu éducatif qu’ils ont visité en ligne. La capacité de MyLK à suggérer du contenu personnel a été reconnue par 61% des répondants. (Chrząszcz et Grodecka, 2018)

Ces réponses globalement satisfaisantes sont sûrement à mettre en perspective avec d’autres paramètres, notamment le fait que MyLK favorise les échanges entre utilisateurs ce qui introduit un facteur humain et social important qui peut avoir son importance dans l’expérience globale des utilisateurs. En effet, plusieurs chercheurs (Amadieu & Tricot, 2015, 2015; Zourou & Lamy, 2008) ont montré que les échanges entre pairs sont un élément important des systèmes éducatifs en ligne.

Le rôle La médiation humaine dans les systèmes d’apprentissage adaptatifs :

Certains systèmes d’apprentissage adaptatifs, entièrement gérés par algorithme, conçoivent des parcours individualisés sans médiation humaine. Cela fait référence à ce qu’Amidieu appelle le concept de «tuteur intelligent ou intelligence artificielle». Selon lui, les dispositifs d’apprentissage adaptatif qui fonctionnent le mieux sont ceux dans lesquels il existe une médiation humaine. Pour lui « Ce n’est pas la machine qui porte l’adaptation mais les humains ». (Amadieu et Tricot, 2015, p. 55).

Pour être efficace, l’apprentissage adaptatif doit donc combiner l’intelligence artificielle et la médiation humaine.

Le diagramme ci-dessous montre un système d’apprentissage adaptatif intégrant la médiation humaine.

En effet, l’intelligence humaine ne peut être réduite à un réseau d’action logique. Au contraire, la caractéristique de l’intelligence humaine est d’être intimement liée aux émotions. Le professeur Antonio Damasio, expert en neurosciences, psychologie et neurologie explique que ce sont les émotions qui permettent de valoriser une action: « bonne », « mauvaise » ou « indifférente ». Ce sont eux qui nous permettent de prendre des décisions sensées en tenant compte non seulement des résultats des expériences et décisions passées, mais aussi de ce que nous avons ressenti à propos de ces expériences et décisions; les émotions ont donc aussi un impact sur la mémoire (Grandguillaume & Piroux, 2004). Il ajoute que « Les processus émotionnels […] sont des programmes d’action associés à des affects, et les sentiments […] sont la perception mentale des états de l’organisme (y compris les états d’émotions qui en résultent) » (Damasio in de Castex, 2017). Ainsi, sans organisme humain, il est impossible de produire des émotions humaines et sans émotions, l’intelligence artificielle ne peut pas donner de valeur aux informations qu’elle traite. En mars 2016, Microsoft a lancé le chatbot Tay (agent conversationnel) sur le réseau social Twitter. En utilisant les connaissances actuelles du traitement du langage naturel, l’entreprise a formé Tay pour qu’elle ait la personnalité d’un jeune de 19 ans. Environ 24 heures après son déploiement, Tay a été retiré de la plate-forme. En effet, le robot a appris de ses conversations avec les utilisateurs et a fini par publier des tweets sexistes, racistes, antisémites et agressifs: Evolution du chatbot Tay en dix heures, 2016 (Beres, 2016). Dans ce cas, le système d’intelligence artificielle n’a pas évalué la pertinence du contenu qu’il a appris, ce qui résume l’impossibilité pour l’intelligence artificielle d’échapper à l’intelligence humaine. Même si l’intelligence artificielle est dotée d’émotions humaines, il n’existe toujours pas de technologie dite non intrusive qui lui permettrait de capturer les données cognitives et métacognitives des utilisateurs, telles que les émotions en réponse à une proposition, les états affectifs qui motivent les utilisateurs  » choix, la logique des opérations cognitives effectuées par eux, etc. Par exemple, un utilisateur répond «4» à la question «1 + 2 =? « . Comment interpréter cette réponse? S’agit-il d’une erreur d’un manque d’attention, ou d’une approche métaphysique de l’algèbre? Ainsi, la machine n’a pas la capacité de capter la nature sinueuse de l’esprit humain, elle ne peut pas y répondre de manière adaptée.

Il convient toutefois de noter que l’intelligence artificielle a permis de développer de nouvelles méthodes pédagogiques qui ont fait leurs preuves au fil du temps et qui sont plus faciles à mettre en œuvre pour un organisme de formation conventionnel. L’apprentissage adaptatif reste le plus innovant de ces nouvelles approches pédagogiques.

Références : 

Amadieu, F., & Tricot, A. (2015). Apprendre avec le numérique : Mythes et réalités. Consulté à l’adresse http://faraway.parisnanterre.fr/login?url=https://www.numeriquepremium.com/content/books/9782725633206

Beres, D. (2016). Microsoft Chat Bot Goes On Racist, Genocidal Twitter Rampage. Consulté 27 Decembre 2019, à l’adresse HuffPost website: https://www.huffpost.com/entry/microsofttay-racist-tweets_n_56f3e678e4b04c4c37615502

Chrząszcz, A., & Grodecka, K. (2018). WP4—D4.2 Report of evaluation. Consulté à l’adresse http://mylk-project.info/wp-content/uploads/2018/09/D4.2_WP4_final_report.pdf

Cyrot, P., & Jeunesse, C. (2012). Autoformation et réseaux virtuels. Consulté à l’adresse https://hal-univ-paris10.archives-ouvertes.fr/hal-01489037

de Castex, E. (2017, décembre 7). Antonio Damasio : l’intelligence humaine ne peut venir aux machines – Anthropotechnie. Consulté 27 Decembre 2019, à l’adresse Anthropotechnie website: http://www.anthropotechnie.com/antonio-damasiolintelligence-humaine-ne-peut-venir-aux-machines/ 

Fenouillet, F. (2017). La motivation (3e édition corrigée et actualisée). Consulté à l’adresse http://faraway.parisnanterre.fr/login?url=http://univ.scholarvox.com/book/88841962

Grandguillaume, A., & Piroux, C. (2004). A. Damasio. L’erreur de Descartes (1995) ; Le sentiment même de soi (1999) ; Spinoza avait raison (2003). L’orientation scolaire et professionnelle, 33(3). Consulté à l’adresse http:// journals.openedition.org/osp/748
Zourou, K., & Lamy, M.-N. (2008). Social networked game dynamics in web 2.0 language learning communities. Alsic, 16(Vol. 16). https://doi.org/10.4000/alsic.2642